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Murger Henry - Sc?nes De La Vie De Boh?me Sc?nes De La Vie De Boh?me

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оксана2018-11-27
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Очень понравилась книга. Рекомендую!
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Vera.Li2016-02-21
Миленько и простенько, без всяких интриг
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ст.ст.2018-05-15
 И что это было?
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Наталья222018-11-27
Сюжет захватывающий. Все-таки читать кни
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Sc?nes De La Vie De Boh?me - Murger Henry - Страница 7


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Le pere Durand disparut dans l'escalier.

– Pardon, monsieur, dit en s'inclinant le proprietaire au jeune homme avec qui il etait reste seul, a qui ai-je l'avantage de parler?

– Monsieur, je suis votre nouveau locataire; j'ai loue une chambre dans cette maison au sixieme, et je commence a m'impatienter que ce logement ne soit pas vacant.

– Vous me voyez desole, monsieur, repliqua M. Bernard, une difficulte s'eleve entre moi et un de mes locataires, celui que vous devez remplacer.

– Monsieur, monsieur! s'ecria d'une fenetre situee au dernier etage de la maison, le pere Durand; M. Schaunard n'y est pas… mais sa chambre y est… Imbecile que je suis, je veux dire qu'il n'a rien emporte, pas un cheveu, monsieur.

– C'est bien, descendez, repondit M. Bernard. Mon Dieu reprit-il en s'adressant au jeune homme, un peu de patience, je vous prie. Mon portier va descendre a la cave les objets qui garnissent la chambre de mon locataire insolvable, et dans une demi-heure vous pourrez en prendre possession; d'ailleurs vos meubles ne sont pas encore arrives.

– Pardon, monsieur, repondit tranquillement le jeune homme.

M. Bernard regarda autour de lui et n'apercut que les grands paravents qui avaient deja inquiete son portier.

– Comment! Pardon… comment… murmura-t-il, mais je ne vois rien.

– Voila, repondit le jeune homme en deployant les feuilles du chassis et en offrant a la vue du proprietaire ebahi un magnifique interieur de palais avec colonnes de jaspe, bas-reliefs, et tableaux de grands maitres.

– Mais vos meubles? demanda M. Bernard.

– Les voici, repondit le jeune homme en indiquant le mobilier somptueux qui se trouvait peint dans le palais qu'il venait d'acheter a l'hotel Bullion, ou il faisait partie d'une vente de decorations d'un theatre de societe…

– Monsieur, reprit le proprietaire, j'aime a croire que vous avez des meubles plus serieux que ceux-ci…

– Comment, du boule tout pur!

– Vous comprenez qu'il me faut des garanties pour mes loyers.

– Fichtre! Un palais ne vous suffit pas pour repondre du loyer d'une mansarde?

– Non, monsieur, je veux des meubles, des vrais meubles en acajou!

– Helas, monsieur, ni l'or ni l'acajou ne nous rendent heureux, a dit un ancien. Et puis, moi, je ne peux pas le souffrir, c'est un bois trop bete, tout le monde en a.

– Mais enfin, monsieur, vous avez bien un mobilier, quel qu'il soit?

– Non, ca prend trop de place dans les appartements, des qu'on a des chaises on ne sait plus ou s'asseoir.

– Mais cependant vous avez un lit! Sur quoi reposez-vous?

– Je me repose sur la Providence, monsieur!

– Pardon, encore une question, dit M. Bernard, votre profession, s'il vous plait.

En ce moment meme le commissionnaire du jeune homme, arrivant de son second voyage, entrait dans la cour. Parmi les objets dont etaient charges ses crochets, on remarquait un chevalet.

– Ah! Monsieur, s'ecria le pere Durand avec terreur; et il montrait le chevalet au proprietaire. C'est un peintre!

– Un artiste, j'en etais sur! Exclama a son tour M. Bernard, et les cheveux de sa perruque se dresserent d'effroi; un peintre!!! Mais vous n'avez donc pas pris d'information sur monsieur? reprit-il en s'adressant au portier. Vous ne saviez donc pas ce qu'il faisait?

– Dame, repondit le pauvre homme, il m'avait donne cinque francs de dernier a Dieu; est-ce que je pouvais me douter…

– Quand vous aurez fini, demanda a son tour le jeune homme.

– Monsieur, reprit M. Bernard en chaussant ses lunettes d'aplomb sur son nez, puisque vous n'avez pas de meubles, vous ne pouvez pas emmenager. La loi autorise a refuser un locataire qui n'apporte pas de garantie.

– Et ma parole, donc? fit l'artiste avec dignite.

– Ca ne vaut pas des meubles… vous pouvez chercher un logement ailleurs. Durand va vous rendre votre denier a Dieu.

– Hein? fit le portier avec stupeur, je l'ai mis a la caisse d'epargne.

– Mais, monsieur, reprit le jeune homme, je ne puis pas trouver un autre logement a la minute. Donnez-moi au moins l'hospitalite pour un jour.

– Allez loger a l'hotel, repondit M. Bernard. A propos, ajouta-t-il vivement en faisant une reflexion subite, si vous le voulez, je vous louerai en garni la chambre que vous deviez occuper, et ou se trouvent les meubles de mon locataire insolvable. Seulement vous savez que dans ce genre de location le loyer se paye d'avance.

Il s'agirait de savoir ce que vous allez me demander pour ce bouge? dit l'artiste force d'en passer par la.

– Mais le logement est tres-convenable, le loyer sera de vingt-cinq francs par mois, en faveur des circonstances. On paye d'avance.

– Vous l'avez deja dit; cette phrase-la ne merite pas les honneurs du bis, fit le jeune homme en fouillant dans sa poche. Avez-vous la monnaie de cinq cents francs?

– Hein? demanda le proprietaire stupefait, vous dites?…

– Eh bien, la moitie de mille, quoi! Est-ce que vous n'en avez jamais vu? ajouta l'artiste en faisant passer le billet devant les yeux du proprietaire et du portier, qui, a cette vue, parurent perdre l'equilibre.

Je vais vous faire rendre, reprit M. Bernard respectueusement: ce ne sera que vingt francs a prendre, puisque Durand vous rendra le denier a Dieu.

– Je le lui laisse, dit l'artiste, a la condition qu'il viendra tous les matins me dire le jour et la date du mois, le quartier de la lune, le temps qu'il fera et la forme du gouvernement sous laquelle nous vivrons.

– Ah! Monsieur, s'ecria le pere Durand en decrivant une courbe de quatre-vingt-dix degres.

– C'est bon, brave homme, vous me servirez d'almanach. En attendant vous allez aider mon commissionnaire a m'emmenager.

– Monsieur, dit le proprietaire, je vais vous envoyer votre quittance.

Le soir meme, le nouveau locataire de M. Bernard, le peintre Marcel, etait installe dans le logement du fugitif Schaunard transforme en palais.

Pendant ce temps-la, ledit Schaunard battait dans Paris ce qu'on appelle le rappel de la monnaie.

Schaunard avait eleve l'emprunt a la hauteur d'un art. Prevoyant le cas ou il aurait a opprimer des etrangers, il avait appris la maniere d'emprunter cinq francs dans toutes les langues du globe. Il avait etudie a fond le repertoire des ruses que le metal emploie pour echapper a ceux qui le pourchassent; et, mieux qu'un pilote ne connait les heures de maree, il savait les epoques ou les eaux etaient basses ou hautes, c'est-a-dire les jours ou ses amis et connaissances avaient l'habitude de recevoir de l'argent. Aussi, il y avait une telle maison ou en le voyant entrer le matin on ne disait pas: voila M. Schaunard; mais bien: voila le premier ou le quinze du mois. Pour faciliter et egaliser en meme temps cette espece de dime qu'il allait prelever, lorsque la necessite l'y forcait, sur les gens qui avaient le moyen de la lui payer, Schaunard avait dresse par ordre de quartiers et d'arrondissements un tableau alphabetique ou se trouvaient les noms de tous ses amis et connaissances. En regard de chaque nom etaient inscrits le maximum de la somme qu'il pouvait leur emprunter relativement a leur etat de fortune, les epoques ou ils etaient en fonds, et l'heure des repas avec le menu ordinaire de la maison. Outre ce tableau, Schaunard avait encore une petite tenue de livres parfaitement en ordre et sur laquelle il tenait etat des sommes qui lui etaient pretees jusqu'aux plus minimes fractions, car il ne voulait pas se grever au dela d'un certain chiffre qui etait encore au bout de la plume d'un oncle normand dont il devait heriter. Des qu'il devait vingt francs a un individu, Schaunard arretait son compte, et le soldait integralement d'un seul coup, dut-il, pour s'acquitter, emprunter a ceux auxquels il devait moins. De cette maniere il entretenait toujours sur la place un certain credit qu'il appelait sa dette flottante; et comme on savait qu'il avait l'habitude de rendre des que ses ressources personnelles le lui permettaient, on l'obligeait volontiers quand on le pouvait.

Or, depuis onze heures du matin qu'il etait parti de chez lui pour tacher de grouper les soixante-quinze francs necessaires, il n'avait encore reuni qu'un petit ecu, du a la collaboration des lettres m v et r de sa fameuse liste: tout le reste de l'alphabet, ayant comme lui un terme a payer, l'avait renvoye des fins de sa demande.

A six heures, un appetit violent sonna la cloche du diner dans son estomac; il etait alors a la barriere du Maine, ou demeurait la lettre u. Schaunard monta chez la lettre u, ou il avait son rond de serviette, quand il y avait des serviettes.

– Ou allez-vous, monsieur? Lui dit le portier en l'arretant au passage.

– Chez M. U… repondit l'artiste.

– Il n'y est pas.

– Et madame?

– Elle n'y est pas non plus: ils m'ont charge de dire a un de leurs amis qui devait venir chez eux ce soir qu'ils etaient alles diner en ville: au fait, dit le portier, si c'est vous qu'ils attendaient, voici l'adresse qu'ils ont laissee, et il tendit a Schaunard un bout de papier sur lequel son ami U… avait ecrit:

«Nous sommes alles diner chez Schaunard, rue… numero…; viens nous retrouver.»

– Tres-bien, dit celui-ci en s'en allant, quand le hasard s'en mele, il fait de singuliers vaudevilles.

Schaunard se ressouvint alors qu'il se trouvait a deux pas d'un petit bouchon ou deux ou trois fois il s'etait nourri pour pas bien cher, et se dirigea vers cet etablissement, situe Chaussee du Maine, et connu dans la basse boheme sous le nom de la Mere Cadet. C'est un cabaret mangeant dont la clientele ordinaire se compose des rouliers de la route d'Orleans, des cantatrices de Montparnasse et des jeunes premiers de bobino. Dans la belle saison les rapins des nombreux ateliers qui avoisinent le Luxembourg, les hommes de lettres inedits, les folliculaires des gazettes mysterieuses, viennent en ch?ur diner chez la Mere Cadet , celebre par ses gibelottes, sa choucroute authentique, et un petit vin blanc qui sent la pierre a fusil.

Schaunard alla se placer sous les bosquets: on appelle ainsi chez la Mere Cadet le feuillage clair-seme de deux ou trois arbres rachitiques dont on a fait plafonner la verdure maladive.

– Ma foi, tant pis, dit Schaunard en lui-meme, je vais me donner une bosse et faire un Balthasar intime.

Et, sans faire ni une ni deux, il commanda une soupe, une demi-choucroute et deux demi-gibelottes: il avait remarque qu'en fractionnant la portion on gagnait au moins un quart sur l'entier.