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Montaigne Michel de - Les Essais – Livre III Les Essais – Livre III

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Les Essais – Livre III - Montaigne Michel de - Страница 21


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Or j'ay une condition singeresse et imitatrice: Quand je me meslois de faire des vers (et n'en fis jamais que des Latins) ils accusoient evidemment le poete que je venois dernierement de lire: Et de mes premiers Essays, aucuns puent un peu l'estranger. A Paris je parle un langage aucunement autre qu'a Montaigne. Qui que je regarde avec attention, m'imprime facilement quelque chose du sien. Ce que je considere, je l'usurpe: une sotte contenance, une desplaisante grimace, une forme de parler ridicule. Les vices plus: D'autant qu'ils me poingnent, ils s'acrochent a moy, et ne s'en vont pas sans secouer. On m'a veu plus souvent jurer par similitude, que par complexion.

Imitation meurtriere, comme celle des singes horribles en grandeur et en force, que le Roy Alexandre rencontra en certaine contree des Indes. Desquels il eust este autrement difficile de venir a bout. Mais ils en presterent le moyen par cette leur inclination a contrefaire tout ce qu'ils voyent faire. Car par la les chasseurs apprindrent de se chausser des souliers a leur veue, avec force noeuds de liens: de s'affubler d'accoustremens de teste a tout des lacs courants, et oindre par semblant, leurs yeux de glux. Ainsi mettoyent imprudemment a mal, ces pauvres bestes, leur complexion singeresse. Ils s'engluoient, s'enchevestroyent et garrotoyent eux mesmes. Cette autre faculte, de representer ingenieusement les gestes et parolles d'un autre, par dessein qui apporte souvent plaisir et admiration, n'est en moy, non plus qu'en une souche. Quand je jure selon moy, c'est seulement, par Dieu, qui est le plus droit de touts les serments. Ils disent, que Socrates juroit le chien: Zenon cette mesme interjection, qui sert a cette heure aux Italiens, Cappari: Pythagoras, l'eau et l'air.

Je suis si aise a recevoir sans y penser ces impressions superficielles, que si j'ay eu en la bouche, Sire ou Altesse, trois jours de suite, huict jours apres ils m'eschappent, pour excellence, ou pour seigneurie. Et ce que j'auray pris en battelant et en me moquant, je le diray lendemain serieusement. Parquoy, a escrire, j'accepte plus envis les argumens battus, de peur que je les traicte aux despens d'autruy. Tout argument m'est egallement fertile. Je les prens sur une mouche. Et Dieu vueille que celuy que j'ay icy en main, n'ait pas este pris, par le commandement d'une volonte autant volage. Que je commence par celle qu'il me plaira, car les matieres se tiennent toutes enchesnees les unes aux autres.

Mais mon ame me desplaist, de ce qu'elle produit ordinairement ses plus profondes resveries, plus folles, et qui me plaisent le mieux, a l'improuveu, et lors que je les cherche moins: lesquelles s'esvanouissent soudain, n'ayant sur le champ ou les attacher: A cheval, a la table, au lict: Mais plus a cheval, ou sont mes plus larges entretiens. J'ay le parler un peu delicatement jaloux d'attention et de silence, si je parle de force. Qui m'interrompt, m'arreste. En voyage, la necessite mesme des chemins couppe les propos: Outre ce, que je voyage plus souvent sans compagnie, propre a ces entretiens de fuite: par ou je prens tout loisir de m'entretenir moy-mesme. Il m'en advient comme de mes songes: en songeant, je les recommande a ma memoire, (car je songe volontiers que je songe) mais le lendemain, je me represente bien leur couleur, comme elle estoit, ou gaye, ou triste, ou estrange, mais quels ils estoient au reste, plus j'ahane a le trouver, plus je l'enfonce en l'oubliance. Aussi des discours fortuites qui me tombent en fantasie, il ne m'en reste en memoire qu'une vaine image: autant seulement qu'il m'en faut pour me faire ronger, et despiter apres leur queste, inutilement.

Or donc, laissant les livres a part, et parlant plus materiellement et simplement: je trouve apres tout, que l'amour n'est autre chose, que la soif de cette jouyssance en un subject desire: Ny Venus autre chose, que le plaisir a descharger ses vases: comme le plaisir que nature nous donne a descharger d'autres parties: qui devient vicieux ou par immoderation, ou par indiscretion. Pour Socrates, l'amour est appetit de generation par l'entremise de la beaute. Et considerant maintefois la ridicule titillation de ce plaisir, les absurdes mouvemens escervelez et estourdis, dequoy il agite Zenon et Cratippus: cette rage indiscrette, ce visage enflamme de fureur et de cruaute, au plus doux effect de l'amour: et puis cette morgue grave, severe, et ecstatique, en une action si folle, qu'on ayt loge pesle-mesle nos delices et nos ordures ensemble: et que la supreme volupte aye du transy et du plaintif, comme la douleur: je crois qu'il est vray, ce que dit Platon, que l'homme a este faict par les Dieux pour leur jouet.

qu?nam ista jocandi

S?vitia?

Et que c'est par moquerie, que nature nous a laisse la plus trouble de nos actions, la plus commune: pour nous esgaller par la, et apparier les fols et les sages, et nous et les bestes. Le plus contemplatif, et prudent homme, quand je l'imagine en cette assiette, je le tiens pour affronteur, de faire le prudent, et le contemplatif: Ce sont les pieds du paon, qui abbatent son orgueil;

ridentem dicere verum,

Quid vetat?

Ceux qui parmi les jeux, refusent les opinions serieuses, font, dit quelqu'un, comme celuy qui craint d'adorer la statue d'un sainct, si elle est sans devantiere.

Nous mangeons bien et beuvons comme les bestes: mais ce ne sont pas actions qui empeschent les offices de nostre ame. En celles-la, nous gardons nostre avantage sur elles: cette-cy met toute autre pensee soubs le joug: abrutit et abestit par son imperieuse authorite, toute la theologie et philosophie qui est en Platon: et si ne s'en plaint pas. Par tout ailleurs vous pouvez garder quelque decence: toutes autres operations souffrent des reigles d'honnestete: cette-cy ne se peut pas seulement imaginer, que vicieuse ou ridicule. Trouvez y pour voir un proceder sage et discret. Alexandre disoit qu'il se connoissoit principallement mortel, par cette action, et par le dormir: le sommeil suffoque et supprime les facultez de nostre ame, la besongne les absorbe et dissipe de mesme. Certes c'est une marque non seulement de nostre corruption originele: mais aussi de nostre vanite et deformite.

D'un coste nature nous y pousse, ayant attache a ce desir, la plus noble, utile, et plaisante de toutes ses functions: et la nous laisse d'autre part accuser et fuyr, comme insolente et deshonneste, en rougir et recommander l'abstinence.

Sommes nous pas bien bruttes, de nommer brutale l'operation qui nous faict?

Les peuples, es religions, se sont rencontrez en plusieurs convenances: comme sacrifices, luminaires, encensements, jeusnes, offrandes: et entre autres, en la condemnation de cette action. Toutes les opinions y viennent, outre l'usage si estendu des circoncisions. Nous avons a l'avanture raison, de nous blasmer, de faire une si sotte production que l'homme: d'appeller l'action honteuse, et honteuses les parties qui y servent (a cette heure sont les miennes proprement honteuses) les Esseniens, dequoy parle Pline, se maintenoient sans nourrice, sans maillot, plusieurs siecles: de l'abbord des estrangers, qui, suivants cette belle humeur, se rengeoient continuellement a eux: Ayant toute une nation, hazarde de s'exterminer plustost, que s'engager a un embrassement feminin, et de perdre la suitte des hommes plustost, que d'en forger un. Ils disent que Zenon n'eut affaire a femme, qu'une fois en sa vie: Et que ce fut par civilite, pour ne sembler dedaigner trop obstinement le sexe. Chacun fuit a le voir naistre, chacun court a le voir mourir. Pour le destruire, on cerche un champ spacieux en pleine lumiere: pour le construire, on se musse dans un creux tenebreux, et le plus contraint qu'il se peut. C'est le devoir, de se cacher pour le faire, et c'est gloire, et naissent plusieurs vertus, de le scavoir deffaire. L'un est injure, l'autre est faveur: car Aristote dit, que bonifier quelqu'un, c'est le tuer, en certaine phrase de son pais.

Les Atheniens, pour apparier la deffaveur de ces deux actions, ayants a mundifier l'isle de Delos, et se justifier envers Apollo, defendirent au pourpris d'icelle, tout enterrement, et tout enfantement ensemble. Nostri nosmet poenitet .

Il y a des nations qui se couvrent en mangeant. Je scay une dame, et des plus grandes, qui a cette mesme opinion, que c'est une contenance desagreable, de mascher: qui rabat beaucoup de leur grace, et de leur beaute: et ne se presente pas volontiers en public avec appetit. Et scay un homme, qui ne peut souffrir de voir manger, ny qu'on le voye: et fuyt toute assistance, plus quand il s'emplit, que s'il se vuide.

En l'Empire du Turc, il se void grand nombre d'hommes, qui, pour exceller les autres, ne se laissent jamais veoir, quand ils font leur repas; qui n'en font qu'un la sepmaine: qui se deschiquettent et decoupent la face et les membres: qui ne parlent jamais a personne. Gens fanatiques, qui pensent honnorer leur nature en se desnaturant: qui se prisent de leur mespris, et s'amendent de leur empirement.

Quel monstrueux animal, qui se fait horreur a soy-mesme a qui ses plaisirs poisent: qui se tient a mal-heur?

Il y en a qui cachent leur vie,

Exilioque domos et dulcia limina mutant ,

et la desrobent de la veue des autres hommes: Qui evitent la sante et l'allegresse, comme qualitez ennemies et dommageables. Non seulement plusieurs sectes, mais plusieurs peuples maudissent leur naissance, et benissent leur mort. Il en est ou le soleil est abomine, les tenebres adorees.

Nous ne sommes ingenieux qu'a nous mal mener: c'est le vray gibbier de la force de nostre esprit: dangereux util en desreglement.

O miseri quorum gaudia crimen habent!

He pauvre homme, tu as assez d'incommoditez necessaires, sans les augmenter par ton invention: et es assez miserable de condition, sans l'estre par art: tu as des laideurs reelles et essentielles a suffisance, sans en forger d'imaginaires. Trouves tu que tu sois trop a l'aise si la moitie de ton aise ne te fasche? Trouves tu que tu ayes remply tous les offices necessaires, a quoy nature t'engage, et qu'elle soit oysive chez toy, si tu ne t'obliges a nouveaux offices? Tu ne crains point d'offencer ses loix universelles et indubitables, et te piques aux tiennes partisanes et fantastiques: Et d'autant plus qu'elles sont particulieres, incertaines, et plus contredictes, d'autant plus tu fais la ton effort. Les ordonnances positives de ta paroisse t'attachent: celles du monde ne te touchent point. Cours un peu par les exemples de cette consideration: ta vie en est toute.

Les vers de ces deux Poetes, traictans ainsi reservement et discrettement de la lascivete, comme ils font, me semblent la descouvrir et esclairer de plus pres. Les dames couvrent leur sein d'un reseul, les prestres plusieurs choses sacrees, les peintres ombragent leur ouvrage, pour luy donner plus de lustre. Et dict-on que le coup du Soleil et du vent, est plus poisant par reflexion qu'a droit fil. L'?gyptien respondit sagement a celuy qui luy demandoit, Que portes-tu la, cache soubs ton manteau? Il est cache soubs mon manteau, affin que tu ne scaches pas que c'est: Mais il y a certaines autres choses qu'on cache pour les montrer. Oyez cetuy-la plus ouvert,