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Murger Henry - Sc?nes De La Vie De Boh?me Sc?nes De La Vie De Boh?me

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оксана2018-11-27
Вообще, я больше люблю новинки литератур
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Professor2018-11-27
Очень понравилась книга. Рекомендую!
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Vera.Li2016-02-21
Миленько и простенько, без всяких интриг
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ст.ст.2018-05-15
 И что это было?
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Наталья222018-11-27
Сюжет захватывающий. Все-таки читать кни
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Sc?nes De La Vie De Boh?me - Murger Henry - Страница 30


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Schaunard articula d'une voix nasale quelques mots qui firent tressaillir Phemie sur sa base.

– Ah! Bah! dit le premier Marcel, faisons pour cent mille francs de depense, une fois par hasard.

– Et puis, ajouta Rodolphe, le comptoir se plaint qu'on ne consomme pas assez. Il faut le plonger dans l'etonnement.

– Oui, dit Colline, livrons-nous a un festin splendide: d'ailleurs nous devons a ces dames l'obeissance la plus passive, l'amour vit de devouement, le vin est le jus du plaisir, le plaisir est le devoir de la jeunesse, les femmes sont des fleurs, on doit les arroser. Arrosons! Garcon! Garcon! Et Colline se pendit au cordon de sonnette avec une agitation fievreuse.

Le garcon arriva rapide comme les aquilons.

Quand il entendit parler de champagne, et de beaune, et de liqueurs diverses, sa physionomie executa toutes les gammes de la surprise.

– J'ai des trous dans l'estomac, dit Mimi, je prendrais bien du jambon.

– Et moi des sardines et du beurre, ajouta Musette.

– Et moi des radis, fit Phemie, avec un peu de viande autour…

– Dites donc tout de suite que vous voulez souper, alors, reprit Marcel.

– Ca nous irait assez, reprirent les femmes.

– Garcon! Montez-nous ce qu'il faut pour souper, dit Colline gravement.

Le garcon etait devenu tricolore a force de surprise.

Il descendit lentement au comptoir, et fit part au maitre du cafe des choses extraordinaires qu'on venait de lui demander.

Le cafetier crut que c'etait une plaisanterie, mais a un nouvel appel de la sonnette, il monta lui-meme et s'adressa a Colline, pour qui il avait une certaine estime. Colline lui expliqua qu'on desirait celebrer chez lui la solennite du reveillon, et qu'il voulut bien faire servir ce qu'on lui avait demande.

Le cafetier ne repondit rien, il s'en alla a reculons en faisant des n?uds a sa serviette. Pendant un quart d'heure il se consulta avec sa femme, et, grace a l'education liberale qu'elle avait recue a Saint-Denis, cette dame, qui avait un faible pour les beaux-arts et les belles-lettres, engagea son epoux a faire servir le souper.

– Au fait, dit le cafetier, ils peuvent bien avoir de l'argent, une fois par hasard. Et il donna ordre au garcon de monter en haut tout ce qu'on lui demandait. Puis il s'abima dans une partie de piquet avec un vieil abonne. Fatale imprudence!

Depuis dix heures jusqu'a minuit le garcon ne fit que monter et descendre les escaliers. A chaque instant on lui demandait des supplements. Musette se faisait servir a l'anglaise et changeait de couvert a chaque bouchee; Mimi buvait de tous les vins dans tous les verres; Schaunard avait dans le gosier un Sahara inalterable; Colline executait des feux croises avec ses yeux, et, tout en coupant sa serviette avec ses dents, pincait le pied de la table, qu'il prenait pour le genoux de Phemie. Quant a Marcel et Rodolphe, ils ne quittaient point les etriers du sang-froid, et voyaient, non sans inquietude, arriver l'heure du denoument.

Le personnage etranger considerait cette scene avec une curiosite grave; de temps en temps on voyait sa bouche s'ouvrir comme pour un sourire; puis on entendait un bruit pareil a celui d'une fenetre qui grince en se fermant. C'etait l'etranger qui riait en dedans.

A minuit moins le quart, la dame de comptoir envoya l'addition. Elle atteignait des hauteurs exagerees, 25 fr 75 c.

– Voyons, dit Marcel, nous allons tirer au sort quel sera celui qui ira parlementer avec le cafetier. Ca va etre grave.

On prit un jeu de dominos et on tira au plus gros de.

Le sort designa malheureusement Schaunard comme plenipotentiaire. Schaunard etait excellent virtuose, mais mauvais diplomate. Il arriva justement au comptoir comme le cafetier venait de perdre avec son vieil habitue. Flechissant sous la honte de trois capotes, Momus etait d'une humeur massacrante, et, aux premieres ouvertures de Schaunard, il entra dans une violente colere. Schaunard etait bon musicien, mais il avait un caractere deplorable. Il repondit par des insolences a double detente. La querelle s'envenima, et le cafetier monta en haut signifier qu'on eut a le payer, sans quoi l'on ne sortirait pas. Colline essaya d'intervenir avec son eloquence moderee, mais en apercevant une serviette avec laquelle Colline avait fait de la charpie, la colere du cafetier redoubla, et, pour se garantir, il osa meme porter une main profane sur le paletot noisette du philosophe et sur les pelisses des dames.

Un feu de peloton d'injures s'engagea entre les bohemiens et le maitre de l'etablissement.

Les trois femmes parlaient amourettes et chiffons.

Le personnage etranger se derangeait de son impassibilite; peu a peu il s'etait leve, avait fait un pas, puis deux, et marchait comme une personne naturelle; il s'avanca pres du cafetier, le prit a part et lui parla tout bas. Rodolphe et Marcel le suivaient du regard. Le cafetier sortit enfin en disant a l'etranger:

– Certainement que je consens, Monsieur Barbemuche, certainement; arrangez-vous avec eux.

M. Barbemuche retourna a sa table pour prendre son chapeau, le mit sur sa tete, fit une conversion a droite, et, en trois pas, arriva pres de Rodolphe et de Marcel, ota son chapeau, s'inclina devant les hommes, envoya un salut aux dames, tira son mouchoir, se moucha et prit la parole d'une voix timide:

– Pardon, messieurs, de l'indiscretion que je vais commettre, dit-il. Il y a longtemps que je brule du desir de faire votre connaissance, mais je n'avais pas trouve jusqu'ici d'occasion favorable pour me mettre en rapport avec vous. Me permettez-vous de saisir celle qui se presente aujourd'hui?

– Certainement, certainement, fit Colline qui voyait venir l'etranger.

Rodolphe et Marcel saluerent sans rien dire.

La delicatesse trop exquise de Schaunard faillit tout perdre.

– Permettez, monsieur, dit-il avec vivacite, vous n'avez pas l'honneur de nous connaitre, et les convenances s'opposent a ce que… Auriez-vous la bonte de me donner une pipe de tabac?… Du reste, je serai de l'avis de mes amis…

– Messieurs, reprit Barbemuche, je suis comme vous un disciple des beaux-arts. Autant que j'ai pu m'en apercevoir en vous entendant causer, nos gouts sont les memes, j'ai le plus vif desir d'etre de vos amis, et de pouvoir vous retrouver ici chaque soir… le proprietaire de cet etablissement est un brutal, mais je lui ai dit deux mots, et vous etes libres de vous retirer… j'ose esperer que vous ne me refuserez pas les moyens de vous retrouver en ces lieux, en acceptant le leger service que…

La rougeur de l'indignation monta au visage de Schaunard.

– Il specule sur notre situation, dit-il, nous ne pouvons pas accepter. Il a paye notre addition: je vais lui jouer les vingt-cinq francs au billard, et je lui rendrai des points.

Barbemuche accepta la proposition et eut le bon esprit de perdre, mais ce beau trait lui gagna l'estime de la Boheme.

On se quitta en se donnant rendez-vous pour le lendemain.

– Comme ca, disait Schaunard a Marcel, nous ne lui devons rien; notre dignite est sauvegardee.

– Et nous pouvons presque exiger un nouveau souper ajouta Colline.