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Бенцони Жюльетта - Belle Catherine Belle Catherine

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оксана2018-11-27
Вообще, я больше люблю новинки литератур
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Professor2018-11-27
Очень понравилась книга. Рекомендую!
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Vera.Li2016-02-21
Миленько и простенько, без всяких интриг
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ст.ст.2018-05-15
 И что это было?
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Наталья222018-11-27
Сюжет захватывающий. Все-таки читать кни
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Belle Catherine - Бенцони Жюльетта - Страница 11


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— Je vais tacher de la vendre ou de la troquer contre une mule, dit-il tandis que les deux femmes mettaient pied a terre.

Catherine leva la tete, abritant ses yeux de sa main contre la lumiere violente, pour regarder, brillantes et pointues sur le bleu dur du ciel, les poivrieres d'ardoise et aussi, accrochee a la muraille au-dessus de la herse de vieux chene noirci, la statue doree de la Vierge, son enfant dans les bras. Mais, plus haut encore, sur le mur, claquait l'etendard rouge ou rampaient les leopards d'Angleterre. D'un geste de la tete, elle designa la grande etoffe pourpre et or a son compagnon.

— Que faisons-nous ? La ville est anglaise, mais nous avons besoin de manger... de nous reposer un peu, de trouver des montures. Je sais bien que nous n'avons guere d'apparence, mais nous n'avons pas non plus de sauf-conduit.

Mais le grand Normand ne l'ecoutait pas. Un gros pli creuse entre ses sourcils couleur de paille, les prunelles retrecies, il examinait attentivement la muraille et, d'instant en instant, son expression se faisait plus grave. Tellement que la jeune femme prit peur. Depuis le debut de leur voyage, elle avait appris a respecter les avis autant que la force, l'adresse et la rapidite de decision de cet etrange garcon qu'elle s'etait attache, mais sans cesser de le surveiller.

— Qu'y a-t-il ? demanda-t-elle, baissant instinctivement la voix.

— Rien, apparemment. Mais ce silence etrange, ces murailles vides, cette porte sans gardes. On dirait que la ville est abandonnee. Et, regardez !

Sa main se tendait vers le sommet de la colline, vers le jet de pierre, formidable et pur de la cathedrale aux tours jumelles aupres duquel se tassait, comme un gros chien, le donjon carre du vieux chateau comtal. Plantee entre les merlons uses du couronnement, une etamine noire s'agitait, sinistre, au bout de sa hampe.

— Quelqu'un est mort, dit Sara qui les avait rejoints. Quelqu'un d'important.

Gauthier ne repondit pas. Il marchait deja, a grands pas, vers le pont-levis. Les deux femmes le suivirent. Ils atteignirent le pont, le franchirent et, devant eux, grimpant vers le palais episcopal, la vieille rue Porte- Drouaise s'etendit, avec ses gros paves inegaux, ses enseignes de fer decoupe peintes de couleurs vives, ses maisons de bois penchees et comme agenouillees sous le poids des grands toits bruns, mais vide... d'un vide tragique et inquietant.

Les trois voyageurs s'avancerent, plus lentement. Cette rue privee de vie les impressionnait malgre eux et ils marchaient presque sur la pointe des pieds. Toutes les portes etaient fermees, tous les volets clos, aucune forme humaine ne se montrait, meme les deux auberges semblaient abandonnees. A mi-chemin de la pente, pres d'un puits qui arrondissait sa margelle moussue sous trois volutes de fer forge, on voyait mieux encore : deux portes enclouees, barrees de fortes planches que de gros clous maintenaient de chaque cote. Ces deux portes firent palir en meme temps Sara et Gauthier tandis que Catherine les contemplait sans comprendre.

Soudain, le silence se peupla. De quelque part sur la colline, sanctifiee par les pelerinages de dix siecles, jaillit un chant religieux psalmodie par des voix rudes et profondes, des moines sans doute, qui marchaient en procession car le chant voyageait. Ce fut Catherine la premiere qui l'identifia.

— Le Dies lrae...fit-elle d'une voix qui s'etranglait.

— Continuons, fit Gauthier entre ses dents, il faut savoir !

Un peu plus haut, la rue faisait un coude marque par l'enseigne, ornee de trois etriers et d'une mollette, d'un maitre eperonner. De ce coin, la vue portait jusqu'au palais episcopal devant lequel il se passait quelque chose d'insolite.

Quelques soldats en cuirasses et chapeaux de fer, armes de longues piques, etaient occupes a attiser un bucher qui degageait une fumee epaisse et noire. Ces soldats avaient le bas du visage masque d'un linge. Aupres d'eux, surveillant leur travail, se tenait un personnage bizarre, tout vetu de cuir et dont la tete ornee d'un masque a long bec pointu semblait celle d'un oiseau.

L'homme au bec d'oiseau, qui n'etait rien d'autre qu'un medecin, tenait d'une main une baguette de coudrier et de l'autre un sac de toile. Il en tirait de grosses poignees d'une poudre verdatre qu'il jetait dans les flammes. La fumee de cette poudre avait une odeur piquante, aromatique, qui luttait contre l'odeur atroce du bucher dans lequel plusieurs cadavres entasses se consumaient. D'autres corps gisaient sur la place, attendant leur tour. Des prisonniers enchaines et masques comme les soldats, des ribauds en guenilles les apportaient et, de temps en temps, en jetaient un dans les flammes. Le bucher venait d'etre allume, sans doute, et crachait d'epaisses volutes noires, ec?urantes.

Mais le spectacle fit dresser les cheveux sur la tete des trois arrivants. Ils avaient compris pourquoi la ville etait deserte, pourquoi les murailles etaient vides, pourquoi les portes n'etaient pas gardees et pourquoi un drapeau noir flottait sur le palais des anciens comtes de Chartres : la pire des calamites s'etait abattue sur la cite de Dieu. La mort noire regnait dans les rues. Chartres avait la peste !

D'une maison-Dieu toute proche, transformee en lazaret, une nouvelle troupe de ribauds sortait, trainant au bout de crochets des corps gonfles et noircis par le terrible mal. Cette vue emporta ce qui restait du courage de Catherine. La panique lui serra le ventre, mais galvanisa ses jambes. Tournant les talons, avec un cri de terreur, elle se mit a courir vers la porte Drouaise, retroussant sa robe a deux mains, aiguillonnee par une peur qui la depassait, la jetait en avant, sourde, aveugle a tout, en proie a l'idee fixe d'echapper a cette enceinte, a ces murs qui retenaient prisonnier le mal mortel. Sortir, sortir vite, retrouver l'herbe verte, l'eau claire, un soleil que la fumee ne fit pas noir ! Derriere elle, Sara et Gauthier faisaient de leur mieux pour la rejoindre, butant comme elle aux paves que la riviere, seule, avait arrondis.

Mais la lumiere doree qui, tout a l'heure, passait sous l'arc de pierre bruni et cire par le temps, avait ete chassee. A la place, bouchant le chemin de l'espace libre, apparaissait le bois rugueux du pont releve. Et la course eperdue de Catherine vint se briser sur la herse baissee aux barreaux de laquelle elle accrocha ses mains tremblantes, appuya son visage en pleurs.

— La porte ! hoqueta-t-elle, ils ont ferme la porte !

A ses cris, un soldat au visage invisible sortit du

corps de garde bien clos, vint a elle et tenta de l'arracher de la grille.

— Defendu de sortir ! Ordre du gouverneur ! Plus personne ! Ordre aussi de l'eveque, sire Jean de Fetigny Il s'exprimait lentement, cherchant ses mots, gene par son accent d'outre-manche. Mais Catherine exasperee tenta de secouer la herse, ecorchant ses mains aux ais de bois qui la formaient.

— Mais je veux sortir ! Je vous dis que je veux sortir ! Je ne veux pas rester la... Je ne veux pas !

— Il faut pourtant, fit le soldat patiemment. Le gouverneur l'a dit : plus personne, sous peine de la corde !

Gauthier et Sara avaient rejoint Catherine et la tsigane detacha doucement Catherine et l'enveloppa de ses bras. Le geant reflechissait en caressant son menton orne d'un epais chaume rougeoyant car, bien entendu, ce menton n'avait pas vu le rasoir depuis la maison du jardinier.

— Qu'allons-nous faire ? demanda Sara.

— Chercher un moyen d'en sortir, repondit-il en haussant les epaules. Je n'ai pas envie d'attendre que la mort noire fasse de moi un cadavre pourrissant qu'on jettera au feu avec un croc de boucher. Et vous ?

— Cette question ! fit Sara avec un regard meurtrier. Mais comment sortir ?

— Il faut y reflechir, repliqua Gauthier en assurant sur son epaule le ballot dans lequel se trouvait la plus grande partie des possessions des deux femmes.