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Последние комментарии
оксана2018-11-27
Вообще, я больше люблю новинки литератур
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Professor2018-11-27
Очень понравилась книга. Рекомендую!
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Vera.Li2016-02-21
Миленько и простенько, без всяких интриг
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ст.ст.2018-05-15
 И что это было?
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Наталья222018-11-27
Сюжет захватывающий. Все-таки читать кни
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Catherine et le temps d'aimer - Бенцони Жюльетта - Страница 17


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Quant a lui...

Un mouvement de colere raidit Catherine. Levant bien haut sa tete blonde, elle coupa :

— Qui vous permet de croire que j'aie quelque envie d'en entendre parler ?

Van Eyck negligea l'interruption. Il detourna les yeux, s'eloigna de quelques pas et, sourdement :

— Votre fuite l'a dechire, Catherine... et je sais qu'il en saigne encore ! Non, coupa-t-il a son tour, ne dites plus rien puisque je ne puis rien ajouter. Oubliez tout ce qui vous tourmente et ne pensez qu'a une chose : je ne suis que votre ami et c'est a ce titre que je vous suivrai demain. Ne voyez rien de plus ! Je vous souhaite une bonne nuit, belle Catherine !

Et, avant que la jeune femme ait pu esquisser un geste pour le retenir, il ouvrit la porte et disparut.

Depuis les remparts a demi demanteles de Saint-Jean Pied-de-Port, l'antique voie romaine grimpait sans arret, durant huit bons milles, jusqu'au col de Bentarte. Le chemin etait etroit, difficile, rendu glissant par les fragments d'anciennes dalles qui l'emaillaient encore et sur lesquels le froid des hauteurs mettait de minces couches de glace.

Il etait rude aussi et montait roidement a travers un paysage qui devenait de plus en plus aride, jusqu'a sembler se perdre dans le ciel meme. Mais Catherine et ses compagnons, sur le conseil du viguier de Saint-Jean, l'avaient prefere a celui, pourtant plus facile, du Val Carlos, pour eviter d'avoir a livrer bataille. Un seigneur-pillard, Vivien d'Aigremont, tenait la route de la vallee avec ses bandes sauvages de Basques et de Navarrais. Certes, les soldats de Bourgogne qui escortaient la dame de Chateauvillain, joints a ceux qui protegeaient Jean Van Eyck, etaient vigoureux, bien armes et pouvaient assurer le passage des voyageurs sans trop de perils. Mais ce que l'on avait entendu dire de la brutalite aveugle et de la sauvagerie primitive des hommes de Vivien d'Aigremont en faisait des ennemis non negligeables, fort superieurs en nombre de surcroit.

Mieux valait prendre la route d'en haut.

A mesure que l'on montait, le froid se faisait plus vif. Un vent aigre soufflait continuellement sur les contreforts des Pyrenees, chassant et ramenant, tour a tour, de longues echarpes de brouillard glace qui cachaient parfois jusqu'aux plus proches rochers. Depuis le depart, a l'aube, personne ne parlait. Il fallait faire attention a l'endroit ou l'on marchait car on avait du mettre pied a terre et mener les chevaux par la bride, sous peine de chute. Et la longue file silencieuse qui s'etirait au flanc de la montagne, dans la lumiere trouble et grise, avait l'air d'une theorie de fantomes. Meme les armes, chargees d'humidite, etaient devenues ternes. Derriere elle, Catherine entendit maugreer Ermengarde qui avancait peniblement, soutenue par Gillette de Vauchelles et Margot la Deroule.

— Fichu temps et fichu pays ! Ne pouvions-nous prendre, comme l'empereur Charlemagne, la route d'en bas ? Les brigands me semblent moins redoutables que ce chemin tout juste bon pour les chevres ! A mon age, galoper dans les rochers comme une vieille bique ! Si cela a du sens !...

La jeune femme ne put s'empecher de sourire. Se detournant a demi, elle lanca :

— Allons, Ermengarde, ne grognez pas ! C'est vous qui l'avez voulu !

Elle n'avait pas souffle mot a la vieille dame de sa conversation avec Van Eyck ! A quoi bon ? Ermengarde n'aurait pas compris que Catherine considerait son geste comme une maniere de trahison. Elle avait cru, en toute bonne foi, agir pour le mieux et pour le plus grand bien de Catherine. Et, apres tout, le peintre et sa solide escorte armee etaient une bonne adjonction a la petite troupe dans ces regions difficiles. Enfin, et quel que puisse etre le mysterieux message que Van Eyck lui delivrerait « quand l'heure serait venue », Catherine savait bien qu'il ne pourrait avoir aucune puissance sur elle s'il tentait de la detourner de son but. Pourtant, les reticences et l'espece de secret que Van Eyck gardait envers elle l'irritaient et piquaient sa curiosite.

Pourquoi ce deplacement presque officiel, ce rang d'ambassadeur, ces hommes d'armes, s'il s'agissait seulement d'un message ? Mais Catherine connaissait assez Jean pour savoir qu'il ne parlerait qu'a son heure. Le mieux etait d'attendre... Et si, depuis le matin, elle marchait en silence, accablee d'une tristesse dont elle ne pouvait se defaire, si elle scrutait le vertigineux paysage, les abimes entrevus par instants entre les sommets blancs, ce n'etait pas a cause de lui, c'etait parce qu'elle songeait a Gauthier... C'etait la le decor de sa disparition, un decor a la mesure de ce geant qu'elle avait cru indestructible ! Mais quel homme de chair et de sang pouvait entrer en lutte contre des geants de pierre et de glace ? Jamais Catherine n'avait imagine qu'il put exister un pays semblable a celui-ci. Et elle realisait, maintenant, que jusqu'a cette minute elle avait espere contre l'evidence, contre l'impossible, que son fidele serviteur etait sorti vainqueur de ce dernier combat et qu'elle le retrouverait dans un lieu quelconque, miraculeusement preserve. Il lui avait fallu venir jusqu'ici pour comprendre qu'il n'y aurait pas de miracle !... Mais, tandis qu'elle peinait sur le difficile chemin, tirant son cheval apres elle, Catherine ne songeait pas a ce qu'elle endurait. Il lui semblait, parfois, voir surgir de la brume la forme massive et rude du compagnon des heures cruelles, son sourire confiant et ses yeux gris qui pouvaient contenir toute la fureur aveugle des vieux dieux nordiques et toute la candeur d'un enfant. Alors, la gorge de Catherine se serrait a lui faire mal et elle devait fermer un instant ses yeux que les larmes noyaient. Et puis l'ombre du bon geant s'eloignait et s'en allait rejoindre, au fond du c?ur dechire de Catherine, la forme arrogante et douloureuse d'Arnaud. Les regrets, un instant, se firent si cruels que la jeune femme eut envie de se coucher la, sur les pierres glacees de ce chemin et d'attendre la mort... Seuls, l'orgueil et une volonte plus forte que son decouragement la maintinrent debout, avancant encore et encore sans qu'aucun de ses compagnons put deviner le drame qui se jouait en elle...

Quand on fut au col de Bentarte, le jour commencait a baisser. Le vent soufflait en rafales si violentes que les voyageurs n'avancaient guere que courbes. La montee etait finie, mais il fallait suivre, maintenant, le chemin des cretes longeant une suite de sommets dechiquetes... Le ciel etait si bas que Catherine avait l'impression qu'en tendant la main elle pourrait le toucher. Derriere elle, quelqu'un dit :

— Par temps clair, on peut voir la mer et aussi les frontieres des trois royaumes de France, de Castille et d'Aragon.

Mais cela n'interessait pas la jeune femme en qui la fatigue commencait a se faire lourde. Il y avait la, dans ce lieu desert, des centaines de petites croix de bois grossier, plantees par les pelerins qui l'avaient precedee et Catherine les regarda avec horreur : il lui semblait cheminer au milieu d'un cimetiere ! La fatigue brouillait ses yeux. Ses pieds lui faisaient mal et tout son corps tremblait de froid. Il fallait que fut bien fort en elle l'espoir de revoir Arnaud pour endurer tant de souffrances.

Le reste du chemin, jusqu'au col, plus bas, d'Ibaneta puis jusqu'au refuge de Roncevaux fut, pour elle, un calvaire que la nuit vint encore aggraver. Quand, enfin, on fut en vue du celebre moustier bati, quelques siecles plus tot, par l'eveque Sanche de la Rose et le roi Alphonse le Batailleur, la lune se leva, deversant une coulee de lumiere froide sur le groupe de batiments aux toits tres bas, aux murs epais et renforces de vigoureux arcs-boutants, qui s'etalait au pied des contreforts du col d'Ibaneta. Une tour carree dominait l'ensemble et la route traversait, sous une voute, le vieux couvent. Le givre poudrait toutes choses, leur conferant une irreelle beaute, mais Catherine, parvenue aux limites de ses forces, y fut totalement insensible. Elle ne vit qu'une chose : sous la voute, des lanternes s'agitaient, portees par des mains humaines, et ces lanternes signifiaient la vie, la chaleur...