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Andersen Hans Christian - Contes merveilleux, Tome II Contes merveilleux, Tome II

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Наталья222018-11-27
Сюжет захватывающий. Все-таки читать кни
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Contes merveilleux, Tome II - Andersen Hans Christian - Страница 35


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– En voila une fameuse cuisson! dit le roi. Allons, qu'on serve la soupe!

– Mais c'est la tout, repondit la souris; la soupe est partie tout entiere dans le feu.

– C'est une mauvaise plaisanterie, dit le roi. Allons, a la suivante.

III Ce que raconta la seconde souricelle

Je suis nee dans la bibliotheque du chateau, dit la seconde petite souris. Il y a comme un sort sur notre famille: presque aucune de nous n'a le bonheur de penetrer jusqu'a la salle a manger ou jusqu'a l'office, objet de tous nos desirs. C'est aujourd'hui pour la premiere fois que j'entre dans cette cuisine. Cependant, pendant mon voyage, j'ai frequente plusieurs de ces lieux de delices. Dans cette fameuse bibliotheque qui fut mon berceau, nous eumes souvent a souffrir de la faim; mais nous y acquimes une belle instruction. La nouvelle du concours ouvert par ordre du roi, pour la decouverte de la recette de la soupe a la brochette, arriva jusqu'a nous. Ma vieille grand-mere se souvint qu'un jour elle avait entendu un des serviteurs de la bibliotheque lire tout haut, dans un des livres, ce passage: «Le poete est un magicien; il peut faire de la soupe rien qu'avec une brochette.» Ma grand-mere me demanda si je me sentais poete; je ne savais meme pas ce que cela pouvait etre.

– Allons, me dit-elle, il te faut voyager, et tacher d'apprendre comment l'on devient poete.

– C'est au-dessus de mes moyens, repliquai-je. Mais ma grand-mere, qui avait souvent ecoute ce qu'on lisait dans la bibliotheque, me dit que, d'apres les plus savantes autorites, il y avait trois ingredients pour faire un poete: de l'intelligence, de l'imagination et du sentiment.

– Si tu te procures ces trois choses, dit-elle, tu seras poete, et alors il te sera facile de preparer cette fameuse soupe. Je partis donc en voyage, a la quete de ces trois qualites; je me dirigeai vers l'ouest. L'intelligence, m'etais-je dit, est la principale des trois; les deux autres sont bien moins estimees dans ce monde: donc je m'attachai a acquerir d'abord l'intelligence. Mais ou la trouver?» Regarde la fourmi, et tu apprendras la sagesse», a dit un certain roi des Israelites, comme ma grand-mere l'avait encore entendu lire. Donc je marchai sans m'arreter, jusqu'a ce que j'eusse rencontre la premiere grande fourmiliere. La, je me mis aux aguets, pour saisir la sagesse au gite. Les fourmis sont un petit peuple bien respectable; elles ne sont qu'intelligence d'outre en outre. Tout, chez elles, se passe comme un probleme de mathematique qui se resout bien methodiquement. Travailler, travailler sans cesse et pondre des oeufs, c'est la, disent-elles, remplir ses devoirs vis-a-vis du present et de l'avenir, et elles ne font pas autre chose. Elles se divisent en superieures et en inferieures; le rang est marque par un numero d'ordre; la reine porte le numero un. Son opinion est la seule vraie; elle possede infuse la quintessence de la sagesse. C'etait de la plus haute importance pour moi; il ne s'agissait plus que de reconnaitre la reine au milieu de ces milliers de petites betes. J'entendis rapporter plusieurs propos d'elle qui temoignaient en effet d'une raison superieure; car ils apparurent absurdes a ma pauvre cervelle. Elle pretendait que sa fourmiliere etait ce qu'il y avait de plus eleve dans ce monde. Cependant, tout a cote se trouvait un arbre qui depassait la fourmiliere d'une centaine de pieds; mais on n'en parlait jamais et, comme les fourmis sont aveugles, le dire de la reine passait pour la verite meme. Un soir, une fourmi egaree se mit a grimper sur l'arbre et, sans monter jusqu'a la cime, parvint cependant plus haut qu'aucune de ses soeurs n'etait jamais montee. Lorsqu'elle fut de retour, elle parla de son ascension, et declara que l'arbre lui semblait bien plus eleve que la fourmiliere; cela fut regarde comme une offense a l'honneur de la communaute, et la pauvre fourmi se vit condamnee aux travaux les plus penibles, tels que charrier les insectes morts, etc. Mais quelque temps apres, une autre fourmi se fourvoya egalement sur l'arbre. Rentree au bercail, elle parla de son excursion avec prudence et amphibologie, laissant cependant deviner, a qui voulait comprendre, que l'arbre etait plus haut que la fourmiliere. Comme elle etait tres consideree, qu'elle etait une des dignitaires de la cour, loin de la persecuter comme la premiere, on placa sur sa tombe, lorsqu'elle mourut, une coquille d'oeuf en guise de monument, pour eterniser le souvenir de son courage et de sa science. Avec tout cela, je n'avais pu encore decouvrir la reine, et j'etais toujours en observation. Je remarquai que les fourmis portaient de temps en temps leurs oeufs a l'air pour les mettre au soleil. Un jour j'en vis une qui ne pouvait plus ramasser son oeuf pour le rentrer. Deux autres accoururent pour l'aider; mais elles etaient elles-memes chargees chacune d'un oeuf; en secourant leur compagne, elles faillirent laisser tomber leur fardeau. Aussitot elles s'en furent, laissant la pauvrette dans l'embarras.

– Voila qui est bien agi, c'est la sagesse meme, entendis-je une voix s'ecrier; chacun est son plus proche prochain. Nous autres fourmis, nous ne nous y trompons jamais; nous naissons toutes raisonnables. Cependant, parmi nous toutes, c'est moi qui ai la plus haute raison. A ces mots je vis, au milieu de la foule qui grouillait, une fourmi se dresser orgueilleusement sur ses pattes de derriere. Il n'y avait pas a s'y tromper, c'etait la reine. Je la happai d'un coup de langue et je l'avalai. Je possedais donc la sagesse et l'intelligence. Ce n'etait pas assez. Je me mis a mon tour a grimper sur l'arbre qui ombrageait la fourmiliere: c'etait un beau chene, deja plus que seculaire; il avait a sa cime une magnifique couronne. Je savais par ma grand-mere que les arbres sont habites par des etres particuliers, des dryades, une nymphe qui nait avec l'arbre et qui meurt avec lui. En effet, au sommet, dans un creux de l'arbre, se trouvait une jeune fille d'une beaute surhumaine, ce qui ne l'empecha pas de pousser un cri d'effroi en m'apercevant. Comme toutes les femmes, elle avait peur des souris; de plus, elle savait que j'aurais pu ronger l'ecorce de l'arbre auquel son existence etait attachee. Je lui dis de bonnes paroles et la rassurai sur mes intentions; elle me prit dans la main et me caressa doucement. Je lui contai pourquoi je m'etais hasardee a courir le monde. Elle me promit que le soir meme, peut-etre, je possederais une des deux choses qui me manquaient pour devenir poete.

– Le beau Phantasus, dit-elle, le dieu de l'imagination, vient souvent se reposer sur ce chene, dont il aime le tronc noueux et puissant, les fortes racines, la majestueuse couronne qui, en hiver, brave la tempete et les neiges, et en ete, forme ce magnifique dome de verdure d'ou l'on domine le vaste paysage que tu vois devant toi. Les oiseaux, qui y abondent, chantent leurs aventures dans les contrees lointaines; la cigogne dont le nid est accroche la-bas, a la seule branche morte, nous raconte meme les merveilles du pays des Pyramides.» Tout cela plait a Phantasus; il aime aussi a m'entendre faire le recit de ma vie. Tout a l'heure il doit venir me voir. Cache-toi en bas, sous cette touffe de muguet; je trouverai bien moyen, pendant qu'il sera perdu dans ses reveries, de lui arracher une petite plume de son aile; jamais poete n'en aura eu de pareille.» Et, en effet, le brillant Phantasus arriva; la bonne dryade lui enleva une plume de ses ailes aux mille couleurs, et me la donna. Je la mis dans l'eau pour la rendre moins coriace, puis, avec assez de peine encore, je la rongeai. Je me trouvai donc posseder intelligence et imagination; restait le sentiment. Je retournai a la bibliotheque; je savais qu'elle contenait beaucoup de ces bons romans qui sont destines a delivrer les humains de leur trop plein de larmes, et qui sont comme des eponges pour pomper les sentiments. Je me souvenais qu'on les reconnaissait a l'air appetissant du papier. J'en attaquai un, puis un second; je commencai a ressentir dans tout mon etre des tressaillements etranges. J'en devorai un troisieme: j'etais poete; il n'y avait plus a en douter. J'avais des maux de tete, des maux de ventre, des douleurs partout; j'etais dans une agitation continuelle. Et, maintenant, comment faire la soupe a la brochette? Mon imagination me fournit force situations, histoires, anecdotes, proverbes ou se trouve une brochette, ou ce qui y ressemble, un batonnet, un petit morceau de bois. Rien de plus amusant et de plus recreatif; c'est bien mieux qu'une vraie soupe. Ainsi, je vais commencer par narrer a Votre Majeste le conte ou, d'un coup d'une petite baguette, la bonne fee transforma Cendrillon et tous les objets de la cuisine; demain ce sera une autre histoire, et ainsi de suite.